Crèche de Noël

 

 

« Cher Monsieur le Tribunal,

 

J’ai pris connaissance il y a quelques jours de votre décision d’interdire la crèche de Noël traditionnellement installée dans le hall du Conseil Général de la Vendée.

Quelle mouche vous a donc piqué ?

Vous avez fait des études je suppose. Peut-être savez vous donc que Noël vient du latin « Natalis » qui veut dire Naissance. Alors je vais vous livrer un secret que vous voudrez bien transmettre à vos confrères qui peut-être nagent avec complaisance dans la même ignorance que vous.

La naissance dont-il est question est celle d’un certain Jésus de Nazareth, né il y a un peu plus de 2000 ans.

Je dis ça parce qu’étant donné que vous n’avez pas interdit les illuminations de Noël, je suppose que vous ignoriez ce détail. Voyez-vous, Noël n’est pas l’anniversaire de la naissance du Père Noel ( je suis désolé si je casse ici une croyance ancrée en vous ) mais bien celle de ce Jésus.

Interdire une crèche sans interdire toute manifestation publique de cette fête est aussi stupide que si vous autorisiez la fête de l’andouillette tout en interdisant la consommation d’andouillette le jour de la fête de l’andouillette.

La crèche c’est ce qu’on appelle une tradition.

Et ne me faites pas croire, Monsieur le Tribunal, que le principe de la tradition vous est étranger. Sinon comment expliquer que les magistrats exercent leur métier dans un costume aussi ridicule si ce n’est parce qu’il est le fruit d’une tradition.

Vous êtes un briseur de rêves Monsieur, vous êtes un étouffeur de sens.

La crèche c’est Noël et Noël c’est la crèche.

La crèche c’est aussi l’histoire d’une famille qui faute de droit opposable au logement est venue se réfugier dans une étable. C’est un signe d’espoir pour tous les sans abri.

La crèche c’est aussi un roi arabe et un autre africain qui viennent visiter un juif. C’est un signe d’espérance et de paix en ces temps de choc de civilisations, de conflit au Moyen Orient et de crainte de  » l’ autre  » attisée par des attentats horribles.

La crèche c’est aussi des éleveurs criant de joie et chantant dans une nuit de décembre. Connaissez vous beaucoup d’agriculteurs qui rigolent en cette période de crise?

La crèche c’est un bœuf, symbole de la condition laborieuse de l’homme.

Enfin, la crèche, c’est un âne, même si une rumeur court disant que cet âne a quitté la crèche en 2014 pour rejoindre le Tribunal administratif de Nantes et ne semble pas en être revenu.

Malgré le fait que vous allez sans doute, par souci de cohérence, vous rendre à votre travail le 25 décembre, je vous prie de croire, Monsieur le Tribunal, à l’expression de mes souhaits de bon et joyeux Noël. »

 

Jean Pierre Santon

 

 

L’ethnocide des paysans français.

ethnocide des paysans français

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ETHNOCIDE DES PAYSANS FRANCAIS

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« CE MONDE ANCIEN »

 une production inédite de la chaîne Histoire
Mercredi 1er mars à 20h40

Un film de Patrick Buisson, réalisé par Guillaume Laidet (89mn) (2017)


C’est à l’exploration d’un continent presque englouti que vous invite ce documentaire sur la fin de la France paysanne. Motorisation, remembrement, exode rural : tout un monde bascule au tournant des années 50 emportant avec lui un type humain et un mode de vie, des traditions et des paysages.

Les dialogues croisés des grands textes de Giono, Vincenot, Hélias, des images d’amateurs et des chants se fondent en une véritable symphonie pastorale pour un peuple disparu.

Qui nous parle de l’ethnocide des paysans français ?? 

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« La conservation du peu qui reste devrait devenir une idée fixe »

Sans commentaires.

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ethnocide des paysans français

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La Butte de Montenoison en Nivernais.

butte de montenoison

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À dix kilomètres au Nord-Est de Prémery, dans l’actuel département de la Nièvre, la Butte de Montenoison est l’un des points culminants du Nivernais du haut de ses 417 mètres d’altitude. Il est vrai qu’elle est bien visible jusqu’à une trentaine de kilomètres environ, au milieu du faible relief qui l’environne…

Le site est aujourd’hui inscrit à l’inventaire des Monuments Historiques.

Le lieu porte des traces d’occupation humaine datant du Néolithique. Elle dut également avoir quelque importance dans le monde Gallo-Romain puisqu’un Oppidum situé à l’intersection de deux voies romaines y fut établi à cette époque.

Sur son côté Nord se dresse aujourd’hui la grande croix blanche d’un calvaire. Une petite table d’orientation est installée non loin, avec un beau coup d’oeil sur le Morvan tout proche. Lorsque le ciel est bien dégagé, il est même possible d’apercevoir la flèche du clocher de Lormes.

Au bout de sa solennelle allée de platanes centenaires, la petite église Notre Dame de l’Assomption, daterait du XIIème siècle pour sa partie la plus ancienne. Son solide clocher carré à toiture d’ardoises du XVIème siècle semble veiller à la quiétude du petit cimetière qui la jouxte, bien protégé par son mur de pierres sèches où farnientent quelques lézards…

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Non loin de l’église subsistent dans les ronces peuplées de geais, quelques amas de pierrailles, ultimes traces d’un château dont les pierres, au XVIIIème siècle, ont servi à l’edification du hameau actuel. Celui-ci possède quelques belles demeures anciennes rappelant la prospérité passée du lieu.

Ce château, dominant toute la riche contrée du Val de Montenoison, fut construit en 1217 par Mahaut de Courtenay qui choisit la Butte de Montenoison pour l’ériger. Mahaut était la fille de Pierre de Courtenay, cousin germain du roi Philippe Auguste.

La forteresse était alors cernée de deux fossés concentriques.

Mahaut de Courtenay, qui naquit en 1188, fut comtesse de Nevers, d’Auxerre et de Tonnerre. Avec son premier époux, Hervé IV, baron de Donzy, il forment le couple mythique de l’histoire locale.

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Sceau de Mahaut de Courtenay

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Leur union, en 1199, posait les bases géographiques du futur Duché de Nevers puis du département actuel de la Nièvre.

Pour se faire pardonner un certain degré de consanguinité prohibée, les deux époux fondèrent trois abbayes : L’Epeau, Bellary et Coche.
Hervé, disparu en 1222, fut inhumé à Pontigny près d’Auxerre, haut-lieu Cistercien, aux côtés de nombreux seigneurs Bourguignons et Champenois.

Mahaut quand à elle, resta fidèle à son pays Nivernais qu’elle administrera encore trente-cinq ans, après la mort d’Hervé.

La Butte de Montenoison est aujourd’hui un lieu paisible où il fait bon randonner. Le petit bourg qui est à ses pieds compte encore cent-vingt habitants et quelques gîtes ruraux où faire étape.

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Gerbert d’Aurillac et les crêtes du Cantal.

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Gerbert d’Aurillac et les crêtes du Cantal.

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En marchant longuement sur l’humus souple ou le rocher osseux de ces crêtes rudes de Haute Auvergne, l’esprit prend son envol au delà de ses propres horizons. Le rythme léger du pas, allié à l’air vif lui permet d’embrasser d’un seul coup d’aile la géologie fantasmagorique de ces antiques volcans émaciés, mille fois burinés et érodés par le gouffre effrayant des siècles.

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Gerbert d'Aurillac

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Il me plaît ainsi souvent de remonter le temps … Ce même temps, qui sculpte d’aussi inexorable façon le rocher et la pâte de l’Histoire humaine…

Nous sommes en 945 de notre ère: Ici même…

En bas, dans la vallée de la Jordanne qui s’écoule paisible, est en train de naître un petit d’homme au sein d’une chaumière… à Belliac très exactement et à quelques enjambées d’Aurillac, que l’on devine à l’horizon Sud-Ouest…

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Gerbert d'Aurillac  *

Ce petit d’homme sera un pâtre, gardant le troupeau familial de ces si belles vaches de Salers aux longues cornes en lyre et aux yeux maquillés, identiques à celles dont nous entendons les cloches devant nous …

… En ces temps donc, le pouvoir Carolingien s’écroule, les Normands vers l’an 900, après les Vandales et les Wisigoths, envahissent à leur tour l’Auvergne, en pillant et détruisant furieusement villes et monastères.

Ce petit pastouriau que nous voyons naître se nomme Gerbert, dont l’Histoire a gardé le souvenir sous le nom de Gerbert d’Aurillac. Dès son plus jeune âge, il fréquente l’abbaye voisine d’Aurillac, fondée par Saint Géraud, et dans le scriptorium duquel les moines copistes transcrivent dans le silence l’antique héritage gréco-romain.

Il y sera remarqué par ses éducateurs pour son inhabituelle agilité intellectuelle et bientôt envoyé dans les plus prestigieux centres d’études, loin de sa vallée natale… Esprit universel, mais aussi pratique, il construit des mécanismes d’horloges ou se penche sur la musique, par exemple (où il établit certaines règles permettant dès lors la naissance de la musique symphonique et non plus polyphonique…)

Sa sagesse et sa renommée devinrent telles dans l’Europe médiévale, qu’il jouera un grand rôle en coulisse dans de nombreux milieux, rôle qui aboutira en 987, au sacre d’Hugues Capet, comme Roi des Francs, après la mort du dernier roi Carolingien Louis V.

Gerbert d’Aurillac fera également l’éducation du fils d’Hugues Capet, le futur roi de France Robert le Pieux.

Gerbert fut le créateur de « la Paix de Dieu » qui fondera les bases morales de la société médiévale en imposant des lois à la guerre: trèves, neutralité des civils et des ecclésiastique, respect des ambassadeurs et des prisonniers, etc…

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Sur ces crêtes aux odeurs de genêts, dont le moutonnement fascinant entraîne mon esprit, j’imagine enfin Gerbert ultimement accéder au siège papal sous le nom de Sylvestre II lors de la mort du pape Grégoire V en janvier 999.

C’est le 12 mai 1003 qu’il fut rappelé au Père, laissant derrière lui le souvenir d’un homme simple et accompli suivant les critères de l’Ordre chrétien d’alors: Homme de foi, intellectuel et homme d’action …

Du haut de ces crêtes battues par les vents, on se prend alors à espérer la naissance de nombreux nouveaux petits Gerbert dans le creuset si malmené de notre vieux pays…

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Les fermes du Moyen-âge.

Les fermes du Moyen-âge

Les fermes du Moyen-âge en Xaintrie:

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L’historien médiéviste Charles H. Haskins, et d’autres à sa suite nous parlent en ces termes de la renaissance que connut l’Occident chrétien au XIIème siècle :

« Le XII ème siècle en Europe fut sur bien des plans une période fraîche et vigoureuse. »

Le village « médiéval » du lieu-dit Le Puy d’Arrel se situe sur la commune de Saint-Julien-aux-Bois en Corrèze, ancienne région de la Xaintrie, aux confins de l’Auvergne et du Limousin.

Un jeune homme du pays, Pierre Gire, à la fraîche et vigoureuse énergie, aidé par son père et son frère, reconstitue intégralement depuis 2006 un village entier de chaumières aux murs de pierre, aux toits de chaume ou de tuiles de chataîgner, blotti au milieu de ses jardins et de ses vergers et parcourus par un réseau de chemins bordés d’antiques murets : « Les fermes du moyen-âge » ainsi dénommées sur les dépliants touristiques.

Le hameau s’étend sur un petit domaine de 7 hectares à 600 mètres d’altitude environ, avec, pour toile de fonds, le somptueux panorama des montagnes d’Auvergne.

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Les fermes du Moyen-âge

C’est après plus de quinze ans de recherches documentaires, archéologiques et ethnographiques de terrain sur la vie rurale au Moyen-Age en Xaintrie, que Pierre, aidé de sa famille, se lance dans cette entreprise peu commune.

Car avant 2006, il n’y avait absolument rien au Puy d’Arrel que prairies et forêts de chataîgners, omniprésents en Xaintrie.

Aujourd’hui, un village médiéval, a surgi de terre. Tout y est authentiquement juste et à sa place, comme créé par la main de l’homme de ces temps reculés: Murs de pierres sèches, charpentes grossièrement équarries, chaume ou tuiles de bois, parquets, meubles, etc …

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fermes du moyen-age

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Quelle passion et quelle ténacité il a fallu à cet homme, pour réaliser sans aucun financement ou moyens techniques particuliers, un rêve d’enfance: celui de vivre dans un village médiéval, avec ses maisons et ses granges, ses plantes et ses animaux !

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Cet extraordinaire témoignage rescussite ici notre lointain passé, où le Génie paysan de ce Moyen-Age des humbles savait alors tirer partie de toutes les ressources de leur terre et où le « développement durable » n’était pas encore une farce.

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Les petits « Pointus » de Mare Nostrum.

Le Brusc

Les petits « Pointus » de Mare Nostrum à la pointe du Gaou 

(Le Brusc, Département du Var)

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Le Brusc
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Vers 600 ans avant notre ère, les Grecs venus de Phocée, fondaient Massalia, mais ce ne fut que vers le IIIème siècle avant J.C. qu’apparut le comptoir de Taurœïs : Le Brusc (En Provençal : fagots de branches ou de souches de bruyère que l’on faisait brûler pour faire fondre puis gratter le goudron des coques de bateaux de pêche.)
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Tauroeïs devint ensuite Taurœntum sous l’occupation romaine, avant que
Wisigoths, Ostrogoths et Francs, ne déferlent tour à tour.
Le Brusc fut par la suite totalement déserté du VIII ème au Xème siècle en raison des incessantes invasions des pirates Sarrazins …
 Ce n’est qu’en 950 à la bataille de Malogineste tout près du Brusc que ceux-ci furent définitivement arrêtés : Un oratoire commémore encore aujourd’hui cet événement :
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L’ancien Oratoire de Malogineste
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L’Oratoire de Malogineste reconstruit en 1965
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Seule l île des Embiez à une encablure, continua à être habitée de par l’exploitation des salines appartenant aux moines de St-Victor à Marseille, seigneurs de Six-Fours à cette époque.
L’autre activité historique du Brusc était une « Madrague » ou port de pêcheurs aux filets.
Celle-ci appartint longtemps à Messire François de Boyer de Foresta, Chevalier et Seigneur de Bandol, Conseiller du Roy Louis XIV, second président du Parlement de Provence, propriétaire « des postes à poser madrague pour la pêche des thons depuis La Ciotat jusqu’à Antibes ».
Beaucoup plus récemment, Le Brusc connut une des période les plus sombres de son histoire puisque bombardé en juin 1944 par les alliés : La population dut être évacuée en totalité et la majeure partie des bâtiments fut détruite par ce bombardement …
La reconstruction qui s’en suivit n’a, hélas, pas toujours été très heureuse ni respectueuse du passé …
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Il reste cependant pour l’âme nostalgique du poête le spectacle réjouissant des petits « pointus » à l’architecture millénaire qui prennent encore la mer à l’aube en pétaradant paisiblement dans les odeurs matinales d’iode, et sur fonds d’horizons doucement vaporeux de Mare Nostrum
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Beauté des chants d’Eglise avant Vatican II

Je me souviens fort bien, enfant, de l’ambiance de la modeste église de granit du village de Haute Loire où nous passions nos vacances, toute emplie encore à cette époque, de la ferveur et de la foi de ces générations ancrées à la glèbe d’Auvergne depuis la nuit des temps …

Ces paysans des années 1960 étaient pour la plupart rassemblés là, dans la pénombre délicieuse des vitraux, silencieux, recueillis, emplis d’un respect profond. Les hommes tenant leur chapeau dans leurs grosses mains gauches et caleuses. Les femmes absorbées dans une intériorité de prière que trahissait parfois le mouvement de leurs lèvres …

… Atmosphère emplie des odeurs mêlées ,ô combien suaves, de l’encens d’église et de la bouse des vaches aux senteurs fleuries de l’été. 

Oui, je me souviens aujourd’hui encore et à jamais,de la paix se dégageant de ces gens fiers, simples, rudes et doux à la fois, nourris de vingt siècles d’osmose avec leur terre et le Catholicisme fécond ayant irrigué notre Histoire. 

Les chants en latin, d’avant la torpille funeste de Vatican II, explosaient en gerbes de lumineuse beauté sous les voûtes sombres et millénaires.

J’ai rétrospectivement compris qu’il m’avait été donné alors de connaitre furtivement les dernières lueurs de ce qu’avait pu être l’Âme immémoriale de la terre de France, à la fois spirituelle et charnelle, aux doubles racines plongeant au plus profond du Ciel et de la Terre.

Autrement dit, aux doubles racines Catholiques et Royales. 

En l’absence de ces racines, l’âme de la France s’évapore peu à peu, laissant apparaitre un désert stérile et sans grâce où il fut jadis un jardin. 

Adieu jardin de Dieu …

Bienvenue dans les zones pavillonaires de l’Eglise cathodique !

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Entre la poire et le fromage…

Quelques éclats d’humour … gascon, picard, alsacien, etc… entre la poire et le fromage … car il serait fort triste d’oublier ce versant truculent de notre patrimoine !

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Jean Lassalle, alors député suppléant des Pyrénées-Atlantiques, raconte son premier « acte » de plus jeune maire de France (21 ans) de la petite commune de Lourdios-Ichère : l’enterrement d’un adjoint.

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Si vous en avez des comme ça, faites le moi savoir 😉 Une belle collection en perspective  …

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La fête de l’Âne et des Fous.

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Les fêtes dans l’ancienne France étaient d’une grande importance dans la vie de nos ancêtres, du temps où l’écran plat, et l’écran tout court d’ailleurs, ne sévissait pas encore …
 
La plupart des fêtes populaires de nos pères étaient évidemment  liées aux fêtes religieuses du calendrier chrétien qui rythmait le cours de l’année.
 
Celles-ci étaient fort nombreuses et omni-présentes.
 
Elles jouèrent dès le Moyen-Âge un grand rôle dans la vie du peuple car elles étaient tout d’abord jours de repos forcé, temps de répit accordé… et autant d’occasions de joyeuses libations et ripailles…
 
L’Eglise plaça peu à peu chaque village de France sous la protection d’un Saint, dont le jour dédié ramenait tous les ans la même occasion de festoyer.
 
Nos ancêtres ne s’en privaient pas: Fabliaux, vives satires mettant en scène de façon fort peu respectueuse des moines et même des Saints ! Nos aïeux aimaient rire, c’est certain, mais s’en tenaient là et n’étaient point incrédules pour autant:
 
J’ai été moi-même témoin dans mon enfance (ce qui n’est-Diable, pas si vieux !), de la ferveur et de la piété des population paysannes de Haute-Loire lors de la messe du Dimanche dans ce grand vaisseau sombre et immémorial qu’était l’église de granit, où les visages graves et recueillis des femmes d’un côté, des hommes de l’autre priaient à la lueur des cierges et dans les odeurs mariées de l’encens, de la savonette fraîche et, omniprésente alors, de la bouse de vache et du bon foin de prairie.
 
Je parle d’il y a environ cinquante ans …
 
Quelle devait être la foi de notre peuple il y a sept-cents ou huit-cents ans…
 
Ce que nous avons la plupart du temps oublié depuis la propagande anti-chrétienne gratuite, laïque et obligatoire, c’est que l’Eglise se prêtait elle-même au rire de bonne grâce ! Elle respecta jusqu’au XVIIème siècle environ les fêtes des Fous et de l’Âne  qui n’étaient autres que la continuation des Saturnales romaines.
 
En effet, à côté des premiers Chrétiens martyrs, ayant renoncé à tout pour suivre leur foi nouvelle, s’est toujours agité la foule épaisse et anonyme, familière des Saturnales …
 
L’Eglise transforma donc graduellement au cours des temps ces festivités devenues quasi-orgiaques, tout en les spiritualisant avec intelligence.
 
Il est à remarquer par ailleurs que cet esprit de fête populaire était conforme au christianisme, victoire des petits et des humbles. Son chef spirituel, à l’imitation du Christ, ne lavait-ils pas alors les pieds des pauvres ?
 
Mais voici ce qui se passait lors de la fête de l’Âne et des Fous :
 
Il s’agissait probablement à l’origine de l’âne ayant réchauffé le Christ dans la crèche … Les offices étaient donc célébrés par le bas-clergé qui chantait le psaume de circonstance: ” Deposuit potentes de sede” (“Il a renversé les puissants de leur trône” : référence au Christ ne reconnaissant aucun pouvoir terrestre.)
 
Un âne était  introduit dans le choeur de l’église, revêtu d’une chappe magnifique. L’Archevêque élu des Fous commençait ensuite l’office, dit de l’Âne, dont le missel (encore conservé à la bibliothèque de Sens), donne un texte étonnant : ” mélange confus de quolibets, de coq-à-l’âne, d’alleluias grotesques écrits en latin bouffon. Tous ce que la paroisse contenait de voix aigres et discordantes, de faussets intolérables, était invité à venir y chanter “in falso”…
 
L’archevêque des fous officiait … Du cuir de savate fumait dans les encensoirs… La nef de la cathédrale servait de salle de danse et le coeur et l’autel étaient abondament pourvus de de boudins grillés, de saucissons, de cruches de vin et autres victuailles rustiques …(” Histoire de Provins” Louis Felix Bourquelot 1838)
 
Au milieu de l’office, les Fous entouraient l’Âne et lui chantaient un éloge complet et fort détaillé 
 
“Pulcher fortissimus, Sarcinis aptissimus”
 (Animal très beau, très fort, et très parfaite bête de somme…)
 
Leur voix était souvent couverte par les formidables braiements du Héros, et l’émulation de la foule déchainée poussant moult Hi-Han en forme d’Alleluia !
 
 
missel des fous
 
Missel de la fête des Fous
 
  
Cette “cérémonie” a perdurée très longtemps malgré les protestations de certains évêques , comme Eudes, évêque de Paris au XIIème siècle, ainsi que d’autres par la suite … devant la tournure que pouvait parfois prendre la chose …
 
Le Pape Innocent III y mis fin par une Bulle au XVème siècle.
 
L’âne disparut  donc alors, mais la fête continua jusqu’ au XVII ème siècle !
 
Témoin, un Acte du Chapître de Sens qui en 1517, recommandait en ces termes la modération aux assistants : ”Aux vêpres on ne versera sur la tête des Préchantres des Fous qu’un seul seau d’eau et sans leur faire de mal ”
 
Les choses ayant probablement dégénéré quelque peu par la suite, cette pratique fut définitivement abandonnée en 1640 par le Concile Provincial de Sens.
 
 
 

La procession du hareng …

procession du hareng
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Je vous propose une nouvelle fois de poursuivre notre petit voyage sur le chemin des fêtes de l’ancienne France..
 
Dans le précédent article au sujet de la « fête de l’Âne et des fous », nous avions pu constater que …  l’ Eglise riait volontiers !
 
Nous sommes, de nos jours, si souvent imbibés d’un anti-christianisme viscéral, doublé d’un cartésianisme aride et suspicieux (merci l’éduc nat !), que nous ne pouvons encore vraiment nous imaginer de telles choses  …
 
Quelques-uns de ses clercs, les chanoines, par exemple allaient même parfois trop loin …
 
Rutebeuf et Boileau le mentionneront dans leurs écrits.
 
Ainsi, avons-nous témoignages nombreux de l’âme paradoxale, à la fois fervente et rigolarde, de ces pratiques disparues qui aujourd’hui nous paraissent, à nous autres « modernes », crédules, naives et pour tout dire un peu méprisables ! Ainsi en va-t-il de la « Cérémonie de la Pelotte« , de la « Bergerette« , dite aussi « Danse des Chanoines« (car les Chanoines dansaient), ou encore de la « Procession du hareng » à Reims

 

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   La Cathédrale de Reims par le peintre Domenico Quaglio 1787-1837

 

En effet, suivant leur Règle, les chanoines, qui vivaient en commun, recevaient « quatre à cinq bons litres de vin à boire par chaque jour. » ….
 
Comment après cela s’étonner de quelques idées riantes ! Ils ne faisaient que mettre en pratique l’adage romain :
 
« Bonum vinum leatificat cor hominem » !
 
Pourquoi d’ailleurs en aurait-il été autrement ? Dieu était alors tout proche des hommes. Le bon curé et ses paroissiens le percevaient tout simplement comme un bon père de famille, juste là, de l’autre côté du ciel … L’expression n’est-elle pas restée : Le « Bon Dieu » !!
 
Dès lors, lui manifester sa joie et fêter la Résurection de son Christ par quelques libations et pas de danse, quoi de plus légitime !
 
Ainsi donc, les jours de Noël, de Saint Etienne, de Saint Jean l’évangéliste, de Pâques, de la Pentecôte, le curé menait-il souvent la danse à travers le cimetière et l église …
 
Les Chanoines, pour leur part, dansaient à Auxerre, à Besançon, à Châlons, à Provins
 
C’est à Auxerre que se déroulait le rituel de « la Pelotte« . Tout nouveau chanoine devait présenter à ses confrères lors de la cérémonie, une balle (pelotte) de jeu de paume. Cette remise se faisait en grande pompe devant le public assemblé pour l’occasion.
 
Le nouvel impétrant remettait donc la pelotte au Doyen des Chanoines qui l’acceptait, l’appuyait d’une main sur sa poitrine, de l’autre prenait la main du nouvel arrivant et tous deux se mettaient à danser tandis que les autres chanoines les entouraient d’une ronde au son de l’orgue modulé sur le « Victimae Paschali Laudes »
 
Tout à coup, le doyen des Chanoines s’arretait et lançait la pelotte au sein de l’assistance qui lui la retournait avec grande effusion et grande liesse !
 
Suivait en général une petite collation aux dépens du nouvel arrivé. Cette coutume subsista jusqu’au XVI ème siècle …
 
A Besançon, les chanoines dansèrent jusqu’en 1738 sur l’air de « La Bergerette » !
 
Ensuite … sans doute à la faveur des « Lumières », l’horizon va progressivement s’obscurcir … et la « Bergerette » sera remisée au rayon des niaseries de l’obscurantisme chrétien et de « l’opium du peuple » :
 
Place dorénavant à la Raison et à la « modernité » !
 
A Reims, les choses se corsaient encore : Pour en goûter toute la saveur, représentons- nous ce qu’était alors, Reims, ville des sacres royaux : Les rois successifs avait richement doté la Champagne de privilèges. Pays de grands crus, gouvernée paisiblement par des évêques débonnaires, peuplée de gens d’Eglise, les moeurs y étaient doulces et la vie paisible… bien que la morale dût parfois y subir quelques menues entorses comme nous allons le voir …
 
Il se trouve que les noms de « Margot la gente », «Julienne l’esgarée », « Jacquette la blanche fleurette », « Guillemette porte-cuyrasse », « Edeline », l’Hotesse de « La Truye-volant », pour n’en citer que quelques-uns, sont mêlés de près à l’histoire des chanoines de Reims.
 
dames moyen age

 

Il est, de même resté dans l’histoire, que toutes avaient visage« frais et riant », le pas « de gracieuse allure », le rire « jeté à l’aventure », menaient grand train, avaient servantes, servants et même pages « aux blonds cheveulx »… pour porter les messages …
 
Les soins de leur beauté étaient leur grande affaire ! Elles se faisaient avec moult pâtes et onguents dents blanches et joues vermeilles…
 
… Et cependant elles étaient dévotes …
 
Autour d’elles papillonnaient bien sûr une foule de jeunes « fringueraulx », vêtus comme Ducs quoique n’ayant souvent vaillant « qu’une pomme » … Ils venaient de toute la Champagne pour « patheliner » les-dites mignones et danser au son du fifre dans tous les bals et galantes assemblées qui y fleurissaient alors.
 
Bien que ces armées de jouvenceaux, godelureaux ou beaux seigneurs, rivalisassent entre eux de bonnes mines et de beaux habits, ces Dames s’obstinaient à leur préférer … clercs ou chanoines …
 
Quelle époque !
 
C’est à Reims aussi que nous aurions pu également assister alors à la « Procession du hareng », qui se passait à peu près ainsi :
 
De la cathédrale Saint Rémi sortait un beau matin toute une procession de chanoines, rangés en double file. Chacun d’eux avaient accroché à ses basques un hareng saur au bout d’une ficelle … et faisait tous ses efforts pour écraser du pied le hareng qui le précédait … tout en évitant, d’un preste et subtil mouvement, que le sien échappe au pied du coreligionaire suivant …
 
Quels rires éclatants et joyeux devaient alors fuser de cette candide assistance quand un maladroit laissait écraser son hareng !
 
Cette curieuse procession se déroulait à l’entrée en Carême … pour rappeler à la population que le temps du jeûne … et du poisson… était revenu !
 
 
procession du hareng

 

Il reste cependant pour l’âme nostalgique du poête le spectacle réjouissant des petits « pointus » à l’architecture millénaire qui prennent encore la mer à l’aube en pétaradant paisiblement dans les odeurs matinales d’iode, et sur fonds d’horizons doucement vaporeux de Mare Nostrum … 
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